1.1 Évolution des processeurs

Depuis plusieurs siècles les hommes cherchent à s'aider de machines pour effectuer des calculs d'abord basiques, puis de plus en plus élaborés. La première machine efficace fut sans doute celle de Blaise Pascal (1623-1662) : la Pascaline, construite en 1641, qui résolvait des additions grâce à des engrenages.


L'économiste et logicien anglais William Jevons (1835-1882) construisit en 1869 une machine à résoudre des problèmes de logique : «la première machine suffisamment puissante pour résoudre un problème compliqué plus rapidement qu'à la main» (Martin Gardner). La machine se trouve actuellement au Museum of the History of Science d'Oxford.
Le statisticien américain Herman Hollerith (1860-1929) inventa la carte perforée moderne pour l'utiliser dans une machine destinée à analyser les résultats du recensement de 1890, aux Etats-Unis. La carte perforée a été pendant longtemps la structure de base de toutes les machines mécaniques.
L'évolution des mathématiques permet l'élaboration de calculateurs cohérents et de plus en plus performants.

La guerre fait naître l'ordinateur électronique

La complication des calculs balistiques, durant la seconde guerre mondiale, aiguillonna le développement de l'ordinateur électronique. En 1944, à Harvard IBM construisit le calculateur électromécanique Mark I, avec l'aide d'IBM.


Le décryptage militaire conduisit aussi à des projets d'ordinateur. Alan Turing, en Angleterre, travaillait à décoder la machine allemande Enigma; les Anglais construisirent un calculateur, le Colossus, pour aider au décryptage.
Atanasoff discuta de son invention avec John Mauchly (1907-1980), qui, plus tard, avec John Eckert (1919-1995), conçut et réalisa l'ENIAC, un calculateur électronique destiné à l'origine aux calculs balistiques. Il est considéré comme le premier ordinateur jamais fabriqué. L'invention du transistor en 1947 transforma l'ordinateur, et permit la révolution du microprocesseur. Pour cette découverte, les concepteurs reçurent le Prix Nobel de Physique en 1956.

De nombreux calculateurs sont fabriqués dans les années 50. De très grande taille, ils vont être révolutionnés par l'invention des circuits intégrés en 1959.

Dans les années 1960, l'informatique devint une discipline à part entière. Le premier département d'informatique fut créé en 1962 à l'Université de Purdue.

BESM-6

En 1965, les Russes mettent au point le BESM-6. Ce calculateur développait une puissance de 1 MIPS avec un processeur 48 bits cadencé a 9 MHz ainsi que 192 Ko de mémoire (tores de ferrite). Le système était composé de 60000 transistors ainsi que 170000 diodes. Il faut noter que cet ordinateur utilise une architecture pipeline et que l'architecture du processeur est plus proche de l'architecture RISC que CISC. Cette machine était à l'usage des civils et des militaires, elle a été fabriquée a 350 exemplaires dont le dernier a été démonté en 1992.

ILLIAC IV

En 1965, Burrough sort l'ILLIAC IV un supercalculateur qui pour la première fois utilise une architecture vectorielle. Il était composé de 64 processeurs à architecture pipeline contrôlé par un processeur central. Chaque unité de calcul disposait d'une mémoire locale de 16Kb (réalisé entièrement en semi-conducteurs pour la première fois). Chaque processeur cadencé à 13Mhz pouvait fournir 4 MFLOPS. Cependant, la mise au point de cette machine fut un énorme échec. Elle devait être constituée de 256 processeurs mais ne put être réalisée. Les performances réelles étaient de 15 MFLOPS alors que les calculs théoriques des ingénieurs permettaient d'espérer jusqu'à 1000 MFLOPS ! D'autre part, la NASA avait commandé l'une de ces machines mais elle ne puy l'installer qu'en 1972 et les mises au point nécessaires ne la rendirent opérationnelle qu'en 1975.





CDC 7600

En 1969, Seymour Cray récidive avec une évolution du CDC 6600: le CDC 7600. La puissance et le design de cet ordinateur étaient redoutables. On retrouve ici les caractéristiques essentielles des ordinateurs de Seymour Cray, qui réalisait des ordinateurs non seulement puissants mais à l'esthétique travaillée. La puissance de ce nouveau supercalculateur était de 20.83 MFLOPS. Le processeur était compatible avec celui du CDC 6600, la période d'horloge avait été divisée par 4, atteignant 27.5 nanosecondes (36 MHz). De plus une architecture pipeline avait permis d'augmenter encore la puissance pour le rendre 30 fois plus performant en pratique que le CDC 6600. Par contre, son défaut était de tomber souvent en panne et d'être donc assez instable (plusieurs pannes par jour).

M-10

En 1973, les Russes mettent au point le M-10 sous la direction de Mikhail Kartsev. C'est un ordinateur multiprocesseur dont la puissance devait atteindre 20 ou 30 MIPS. Des dizaines de M-10 ont été fabriqués. Ce calculateur est très longtemps resté secret car il faisait partie du programme soviétique SPRN, programme qui visait a détecter les lancements de missiles nucléaires a l'échelle mondiale grâce à la détection par satellite de la traînée laissée par le missile et ensuite un suivi précis au radar. Les russes ont également fait travailler à travers un réseau plusieurs de ces M-10.





Cray-I

En 1976, Seymour Cray qui avait quitté Control Data Corporation en 1972 pour créer Cray Research Inc. présente le premier supercalculateur de cette nouvelle firme: le Cray-I. Comme à l'habitude, la puissance et le design de ce nouvel ordinateur sont particulièrement remarquables. Ce nouveau calculateur sorti de l'esprit de Seymour Cray disposait d'un processeur 64 bits cadencé a 83MHz. Il utilisait des circuits a faible densité d'intégration mais beaucoup plus rapides (ECL) et très nombreux (20 000) ce qui impliqua le développement d'un système de refroidissement au Fréon. La forme remarquable en arc de cercle a permis de réduire les longueurs des différents fils. L'architecture est de type vectorielle. Toutes ces innovations on permis de réaliser une machine d'une puissance de 166 MFLOPS pour un prix de 700000 dollars. Le Cray-I a ainsi reçu les titres d'ordinateur le plus cher, le plus rapide mais aussi au rapport prix/ puissance le plus favorable! Le côté esthétique n'a pas été laissé de côté car chaque heureux acquéreur d'un Cray-I pouvait choisir sa couleur. Le 1er Cray-I a été livré à "Los Alamos National Laboratory" et au total 16 machines furent produites.

M-13

En 1979, fort de son expérience avec le M-10, Mikhail Kartsev se lança dans la création du M-13. Ce nouveau supercalculateur soviétique était basé sur une architecture vectorielle multiprocesseur réalisée avec la technologie LSI (haute capacité d'intégration pour les circuits). La puissance était vraisemblablement entre 50 et 200 MIPS.

CYBER 205

En 1981, CDC propose le CYBER 205 après avoir sorti le CYBER 203 en 1979. C'est l'ordinateur le plus rapide du marché, disposant d'une puissance de 200 MFLOPS. C'est un ordinateur a architecture vectorielle qui dispose d'une mémoire de technologie MOS de 32 Mo. La technologie d'intégration de circuit était ECL/LSI.

Cray X-MP

En août 1982, Cray Research Inc. présente le supercalculateur Cray X-MP. C'est le premier ordinateur multiprocesseur de la firme avec au choix 2 ou 4 CPU. Chaque processeur est basé sur une architecture vectorielle MIMD et cadencé à 117 MHz. Chacun des processeurs développe une puissance de 234 MFLOPS. On pouvait par ailleurs ajouter 2 SSD (Solid State Disks) composés, en fait, de RAM d'une taille maximale de 1 Go, le tout relié par une liaison a 150 Mo/s. Ce produit fut le plus grand succès de l'entreprise de Seymour Cray car il fut produit a 182 exemplaires. Le système d'exploitation était UNICOS, basé sur la technologie UNIX System V. La puissance totale maximale était de 842 MFLOPS pour la version à 4 processeurs, la puissance moyenne de 220 MFLOPS. Une telle machine se vendait, en 1986, à un prix de 14,6 M$ pour le système principal et 3,5 M$ pour un SSD de 256 Mo.

Cray-2

En 1985, Seymour Cray est a l'origine du premier calculateur qui réussit a dépasser la barre des 1 GFLOPS. Cette machine est équipe de 4 processeurs fonctionnant à 250 MHz. La technologie d'intégration de circuit est VLSI (Very Large Scale Intégration). Le système peut adresser directement 4 Gb de mémoire. Chaque processeur a une puissance de 488 MFLOPS, soit pour la totalité de la machine 1.951 GFLOP. Un programme de multiplication matricielle utilisant les 4 processeurs atteint la vitesse de 1.7 GFLOPS. Pour cette machine le refroidissement a dû être particulièrement étudié. La solution adoptée fut d'immerger l'ensemble du système dans un liquide conducteur de chaleur et isolant (le fluorocarbon).

CM-1

En 1986, la société Thinking Machines met au point une machine d'un nouveau type: une machine massivement parallèle. En effet, la Connection Machine CM-1 pouvait disposer de 65536 processeurs de type SIMD. Mais, dans cette architecture, chaque processeur réalise de petites tâches simples, ce qui importe c'est le résultat du travail de l'ensemble des processeurs. Pour cela, par analogie avec le cerveau humain, ce sont les connections entre les processeurs qui permettent de faire un travail. La résolution d'un problème se réduit a configurer les différentes interconnections. La difficulté est dans la programmation d'un tel système ainsi que l'optimisation des programmes pour profiter réellement de la puissance de la machine.

Avec la Connection Machine CM-1 et son architecture massivement parallèle on peut dire que la majorité des grandes inventions dans le domaine des supercalculateurs ont été réalisées. Les principaux acteurs du marché sont Seymour Cray avec Cray Research Inc. qui continua sa ligne de machines Cray, et Thinking Machines qui sortit aussi d'autres machines basées sur le même type d'architecture massivement parallèle.

Apparition et évolution des microprocesseurs

Le tout premier microprocesseur fut construit par Intel en 1971. Le 4004, conçu par Ted Hoff (né en 1937) et Federico Faggin (Intel), fonctionnait en 4 bits et ses instructions étaient longues de 8 bits. Il fonctionnait à la cadence de 108 kHz et était composé de 2300 transistors. Il était aussi puissant que l'ENIAC qui occupait lui une surface de plus de 300 m2. Il ouvre la voie à l'incorporation d'intelligence artificielle sur des structures personnelles (PC, personal computer).

Voici les différents représentants de la famille des processeurs Intel depuis le 4004 de 1971 :

4004
8080
80286
80386
80486
pentium
pentium II
pentium III
pentium 4

  

processeur

Date

nombre de transistors

fréquence quartz

fréquence max (MHz)

bits

taille de la gravure (microns)  

4004

nov-71

2300

0,108

0,108

4

pas de donnée

4040

févr-72

2300

0,747

0,747

4

pas de donnée

8008

avr-72

3500

0,3

0,3

8

pas de donnée

8080

avr-74

6000

2

2

8

pas de donnée

8086

juin-78

29000

5

10

16

pas de donnée

80286

févr-82

134000

6

12,5

16

pas de donnée

80386 DX

oct-85

275000

16

33

32

pas de donnée

80486 DX

avr-89

1200000

25

50

32

pas de donnée

Pentium P5

mars-93

3100000

60

66

64

1

Pentium

mars-93

3300000

90

120

32

0,6

Pentium pro

oct-95

5500000

150

200

32

0,6

Pentium II

juil-97

7500000

200

450

64

0,35

Pentium III

mars-99

29000000

450

1000

128

0,18

Pentium IV

nov-00

42000000

1400

1500

128

0,13