Droit français applicable au site Web
II. Respecter l'ordre public et le droit d'auteur
II.1 Respect de l'ordre public
II.1.1 Eléments interdits
De nombreux comportements ou sujets de publication peuvent tomber sous le coup de la loi pénale française :
- injures, diffamation ;
- atteinte a l'intimité de la vie privée ;
- racisme, antisémitisme, révisionnisme, incitation à la haine raciale ;
- pornographie lorsqu'elle est susceptible d'être vue par un mineur ;
- pédophilie ;
- incitation à la consommation de substances interdites ;
- piratage informatique (fournitures de warez, cracks, serials, chevaux de troie...) : peu de gens savent qu'il y a un arsenal repressif prévu spécialement pour sanctionner les "accès ou maintien frauduleux dans un système de traitement automatisé de données, et que même la tentative d'accès est sanctionnable : attention donc aux scans ou tentatives d'intrusion via Back Ofice (qui permet d' administrer l'ordinateur à distance. Après la prise de contrôle, souvent indécelable, le pirate peut introduire des programmes de corruption tels que des virus ou des bombes, modifier des données, par exemple défigurer une page web, installer des programmes espions tel que Sniffer) ou autres joujoux de ce genre...
Ces éléments peuvent se concrétiser directement sur le site Web ou encore être vu grâce à des liens( cf. I.2 Respect du droit d'auteur), le site constituant alors une "jump-station" vers d'autres sites (parfois du même exploitant) au contenu beaucoup plus discutable voire interdit. Les liens doivent alors être supprimés.
Enfin, vous pouvez consulter le site de l'AFA (Association des Fournisseurs d'Accès) qui publie sur son site des préconisations, et des informations utiles sur les pratiques applicables. L'AFA a en outre mis en place un site spécialement dédié à l'information sur les contenus illegaux : AFA Point de Contact.
II.1.2 Exemple de jurisprudence
Le MRAP (Mouvement contre le Racisme et pour l'Amitié entre les Peuples) a obtenu, le 4 novembre 2003, la condamnation pour incitation à la haine raciale du webmaster d'un site, aujourd'hui fermé, soutenant la cause israélienne. En été 2002, le site amisraelhai.org avait lancé un appel contre 149 personnalités françaises qui soutenaient la cause palestinienne et le boycott de produits israéliens. Parmi cette liste figuraient une quarantaine de personnes d'origine juive auxquelles le webmaster, qui se revendique pourtant du judaïsme, avait apposé une étoile de David. Le tribunal correctionnel de Paris qui a donné raison à l'association antiraciste s'est montré particulièrement sévère en prononçant une peine de prison de quatre mois de prison avec sursis. Le juge a aussi octroyé individuellement 1 000 euros de dommages-intérêts à la vingtaine de plaignants qui avaient joint cette action à celle du MRAP.
II.2 Respect du droit d'auteur
Le droit d'auteur a été défini essentiellement par 2 lois : la loi du 11 mars 1957 , et la loi du 3 juillet 1985. L'ensemble des textes est codifié au sein du CPI (Code de la Propriété Intellectuelle) depuis le 1er juillet 1992.
II.2.1 Avant propos
II.2.1.1 L'auteur d'une oeuvre de l'esprit
"L'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle [1] exclusif [2] et opposable à tous ... " Article L.111-1 du CPI.
L'auteur d'une oeuvre de l'esprit bénéficie donc en France d'une protection de ses droits.
II.2.1.2 Un site Web est-il une oeuvre de l'esprit ?
Pour qu'une oeuvre soit protégée par le droit d'auteur, il faut qu'elle soit originale. Original ne veut pas forcément dire "nouveau". L'oeuvre originale doit simplement être le reflet de la personnalité de l'auteur...
Ceci exclut du champ de la protection les idées (mêmes nouvelles).
La loi (Art. L.112-2 du CPI) donne quelques exemples d'oeuvres de l'esprit. En voici :
- les photographies ;
- les logiciels ;
- les oeuvres publicitaires.
Un site Web utilise des logiciels (soumis à une législation spécifique), des bases de données (qui sont elles aussi soumises à une législation spécifique). Un site Web est donc considéré comme une oeuvre de l'esprit. On lui applique donc le droit d'auteur.
II.2.2 Les droits d'auteur
Le code de la propriété intellectuelle définit deux catégories de droits pour les auteurs :
- les droits moraux ;
- les droits patrimoniaux.
II.2.2.1 Les droits moraux (articles L.121-1 à L.121-9 du CPI)
Les droits moraux dotent la législation française d'un dispositif tout à fait original. C'est ce qui nous différencie des pays qui ont une législation de type copyright.
Ces droits sont notamment :
- le droit "au respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre" ;
- le droit à l'intégrité de l'oeuvre ;
- le droit de "divulguer son oeuvre" (ou non) ;
- le droit de retrait, ou de repentir : un auteur peut, après avoir diffusé son oeuvre, décider d'en retirer tous ses exemplaires en circulation.
II.2.2.2 Les droits patrimoniaux (articles L.122-1 à L.122-12 du CPI)
Les droits patrimoniaux sont ceux dont l'auteur dispose sur les conditions d'exploitation de son oeuvre. A l'origine, seul l'auteur dispose de ces droits patrimoniaux. Mais le droit d'exploitation d'une oeuvre peut être cédé. Cette cession doit obligatoirement être prévue par un contrat écrit précisant notamment les modes d'exploitation cédés ainsi que la durée de la cession.
Parmi les droits patrimoniaux, on relèvera notamment :
- le droit de représentation ;
- le droit de reproduction.
II.2.2.3 Transmission des droits aux héritiers
Les droits patrimoniaux sont transmissibles aux héritiers qui en bénéficient pendant une période de 70 ans après la mort de l'auteur. Passé ce délai, l'oeuvre tombe dans le domaine public.
II.2.3 Respecter les droits d'auteur
II.2.3.1 Droit de copie et de reproduction
ll est extrêmement fréquent de retrouver les mêmes images ou les mêmes motifs d'un site à l'autre. De deux choses l'une : ou bien l'image en question est "libre de droits" (attention a cette idée recue : une oeuvre n'est jamais réellement libre de droits...), et il n'y a que très peu de chances que vous ayez des soucis en l'utilisant, ou bien elle a été repiqué quelque part sans l'autorisation de son créateur, et là...DANGER !!
Ne peuvent donc être reproduits sans l'autorisation de leur auteur (avec paiement éventuel d'une licence) :
- photos ;
- images ;
- icônes ;
- logos ;
- textes, livres ;
- sons ou musique (même sous la forme de fichiers midi) ;
- ... cette liste n'est pas exhaustive !
Et ceci qu'il s'agisse des oeuvres originales ou d'oeuvres retouchées ou arrangées. Dans ce cas, il s'agit d'oeuvres d'adaptation qui sont soumises à un régime quasi-identique.
Ne croyez pas que ces règles soient enfouies dans un vieux tiroir poussiéreux... l'APP (Agence pour la Protection des Programmes) se charge de veiller à leur respect. Les agents assermentés de l'APP sont habilités à effectuer des constats afin de faire cesser des atteintes au droit d'auteur. Ainsi, à l'automne 1997, 90% des sites contenant des fichiers sonores de format midi, MP3 ou wav des oeuvres de Jean-Michel JARRE ont été fermés sur injonction de l'APP. Lorsque les fournisseurs d'hébergement accueillant ces sites ont refusé de les fermer, ils ont été placés sur une liste rouge rendue publique par l'APP.
Il vaut donc mieux considérer que tout ce que vous trouvez sur le Net est protégé par le droit d'auteur sauf preuve du contraire, plutot que de penser que tout est de libre usage sauf précision contraire!
Prenez donc le temps de créer et non de copier!
II.2.3.2 Liens hypertextes : quelles précautions à prendre ?
Les liens hypertexte sont la base même du fonctionnement du Web en ce qu'ils sont au coeur de la navigation de l'utilisateur, lui permettant de passer d'une page Web à une autre d'un même site ou d'un site à un autre. La réalisation d'un lien hypertexte est techniquement très facile à réaliser, mais peut avoir des conséquences juridiques en dépit de son apparence anodine. C'est notamment le cas lorsque le lien hypertexte est détourné de sa finalité première, reflète un comportement manifestement parasitaire ou enfreint des droits de propriété intellectuelle.
Le "deep-linking"
Le "deep-linking" consiste précisément à renvoyer directement à une page interne d'un site est, en principe, interdit. En effet, cette pratique peut être préjudiciable au site cible puisqu'elle permet de sauter la page qui contient le plus souvent les bandeaux publicitaires, les avertissements de l'auteur ainsi que les conditions d'utilisation du contenu. Rappelons que le lien constitué par le nom ou le logo d'une marque nécessite impérativement l'autorisation de reproduction et de représentation du nom ou du logo en question, à défaut de quoi il constitue un acte de contrefaçon de marque.Le "framing"
Le "framing" est une technique qui consiste à intégrer tout ou partie d'un site (le site cible) dans son propre site (site initial). L'accord exprès de l'auteur du site cible est toujours requis et ne peut en aucun cas être présumé. En effet, cette pratique peut lui être préjudiciable, les visiteurs du site initial risquant de ne pas comprendre que le contenu auquel ils ont accès provient en fait du site cible. De plus, les oeuvres du site cible risquent d'être associées à des contenus dont leur auteur ne partage pas les idées, ce qui peut constituer une atteinte à son droit moral. En général, le "framing" ne reprend qu'une partie du site cible, se pose donc aussi la question du droit à l'intégrité de l'oeuvre dans le cas où le site cible serait une oeuvre protégée par le droit d'auteur. Quand bien même le site cible ne serait pas protégé par le droit d'auteur, le "framing" pourrait éventuellement être qualifié de concurrence déloyale ou tout simplement d'acte dommageable de nature à engager la responsabilité civile de son auteur.L'"inline-linking"
L'"inline-linking" est également soumis à l'accord de l'auteur du site cible. Cette technique consiste à intégrer dans le site initial, sans référence au site cible, une image ou un autre élément de ce site.
II.2.4 Exemple de jurisprudence
Le tribunal correctionnel d'Epinal a rendu une décision le 24 octobre 2002 : un site Internet mettait à la disposition des visiteurs des fichiers MP3 en violation des droits d'auteurs. L'auteur du site condamné à 4 mois de prison avec sursis et à 3000 euros de dommages-intérêts. Le site ne proposait cependant que des liens vers ces sites illicites et n'hébergeait pas les fichiers mp3 eux- mêmes.